Objects of affection: The story behind the things lying around my home
1. Un petit morceau de bois, d’origine inconnue
J’ai trouvé ce petit morceau de bois rond sur mon étagère. Qu’est-ce ? Je n’en ai aucune idée. Un pion, peut-être ? Mais pour quel jeu ? Je me demande comment les choses se retrouvent sur nos étagères. L’avais-je auparavant trouvé par terre et lui avais-je dit :, « tiens, je te cherchais, toi ! » Ou m’étais-je dit, en le déposant sur cette étagère : « je ne sais pas ce que tu es mais c’est l’endroit parfait pour toi, ici. » C’est drôle, mais je pense toujours que mon être d’avant était beaucoup plus connaisseur que mon être d’aujourd’hui. Si j’ai placé ce petit morceau de bois là, c’est bien pour une raison. Alors je ne vais pas remettre en question la Coline du passé. Elle en sait beaucoup plus que moi. Ainsi, ce petit morceau de bois, d’origine inconnue, restera sans doute jusqu’à la fin de mes jours, perché sur cette étagère.
2. Une petite ficelle verte
Cette petite ficelle me suit partout. Elle disparaît pendant quelques jours puis réapparaît un beau jour dans mon lit, près de mes chaussures ou sur mon canapé…C’est l’objet préférée de mon chat, après moi bien sûr. Elle me l’apporte pour que je la lui jette et qu’elle puisse l’attraper, même si je suis en train de dormir ou de regarder un film. Bien que je lui aie acheté des dizaines de gadgets – une balle qui bouge toute seule, une espèce d’engin qui fait tourner une ficelle… Non, rien d’autre ne l’intéresse. C’est seulement ce bout de ficelle-là, que je ne sais comment je me le suis procuré et qui ne m’a sans doute rien coûté, avec lequel elle veut jouer. Alors que faire ? Je lance la ficelle. Je la gâte. Je n’achète plus de gadgets. Mais je suis hantée pour toujours par ce bout de ficelle !
3. Une statuette Mexicaine
Je l’ai nommé Enrique. C’était le nom de mon hôte airBNB à Mexico. Enrique, la figurine, fut cependant acheté à Puebla, connue pour sa gastronomie, son architecture et ses céramiques. Alors que je traversais un petit marché avec mon mari et mon amie mexicaine, Anna, je me suis arrêtée là, devant Enrique. C’était peut-être ses yeux qui se fixaient sur moi. Ou alors sa posture, fière et qui respirait la confiance en soi. Enrique m’avait ensorcelée. J’ai marchandé, avec l’aide d’Anna, pour cet Enrique. Moins de 10 euros, c’était bon marché. Maintenant il veille sur moi, dans mon appartement new-yorkais. Ce « manspreader » (terme anglais pour désigner les hommes qui s’assoient en écartant les cuisses et qui occupent plus que la largeur de leur siège) est un symbole d’assurance masculine. Et j’en ai besoin, moi, de cette assurance de temps en temps
4. Un corail jaune
Il n’y a pas beaucoup de choses que j’aime de la période de ma vie que j’ai passée à Boston. J’ai habité cette ville un ans et demi et cela reste un de mes plus grands regrets. On le répète tout le temps : il ne faut jamais déménager par amour. Mais voilà, j’étais jeune. À vingt-et-un ans, je voulais m’aventurer dans une nouvelle ville en espérant de me rapprocher de mon ami qui, à l’époque, était toujours à l’université où nous nous étions rencontrés, dans le Maine. Cependant, il n’y avait pas moyen que je reste dans cet état froid et sinistre l’hiver, alors j’ai trouvé un compromis. Boston était à quatre heures de route en bus. On se verrait quand on pourrait le weekend…
Je ne me suis jamais sentie accueillie par cette ville. Ses habitants sont rudes, impénétrables, antipathiques, démocrates en théorie mais d’un esprit étrangement traditionnel et conservateur. La ville de Boston elle-même s’éteint dès que les gens quittent le travail et rentrent chez eux, dans les banlieues. Même la journée, je n’ai jamais pu trouver son âme. La relation avec cette ville et avec cet ami n’a, sans surprise, pas duré. Je me suis débarrassée de presque tout ce que j’avais acquis pendant ma période à Boston. Mais j’ai gardé – et je continue d’apprécier – ce morceau de corail que j’ai acheté dans un vide-grenier près de l’endroit où j’habitais. Il est brillant et gai, ce que je n’arrivais pas à être à vingt-et-un ans, dans cette ville monotone et rébarbative.
5. Une eponge grecque
Etrange coïncidence. Daniel Spoerri, auteur du livre Topographie Anecdotée du Hasard, qui a inspiré ce propre texte (et peut etre aussi mon blog), s’était rendu à Symi, île grecque d’une beauté à couper le souffle, en 1970. Il y est resté six mois et il a évoqué la vie qu’il avait là-bas dans Mythology & Meatballs.
Cette éponge, qui se trouve à côté de mon évier de cuisine, a aussi été achetée à Symi. Je m’y étais rendue en voyage de noces et j’y ai passé cinq jours avec mon nouveau mari, Andrew. Spécialité des pêcheurs de Symi, ces éponges envahissent le port et sont vendues comme souvenirs aux touristes. J’en étais une, et je n’ai pas pu résister. Je la trouvais tellement belle, cette éponge ! Objet banal, mais rare. Objet naturel. Objet doux. Alors, aujourd’hui, j’ai peur de m’en servir. Elle est devenue plutôt décoration qu’objet utile. Elle me fait penser à ces jours merveilleux sur cette île qui inspire et fait rêver.
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